3 mai 2013

Les campagnes contre le partage de lit se trompent-elles de cible?

En 2011, la ville de Milwaukee a lancé une campagne controversée contre le partage de lit qui montrait un bébé dormant avec un couteau de boucherie. "Dormir avec votre bébé pourrait être aussi dangereux" pouvait-on lire sur l'affiche. (Voir l'image) Devant de telles images, les gens voient de plus en plus le partage de lit comme un comportement non-sécuritaire. C'est pour cette raison que des chercheurs de l'Université Murdoch en Australie exhortent les organismes de santé publique à revoir leur attitude face au partage de lit.

Campagne contre le partage de lit
Selon Catherine Fetherston, professeure associée à l'Université Murdoch, les recommandations condamnant le partage de lit ne sont pas basées sur de réelles preuves scientifiques et vont à l'encontre des besoins des bébés. En fait, Mme Fetherston va jusqu'à dire qu'il n'y a pas d'études démontrant un risque inhérent au partage de lit.

Selon elle, les études analysant cet arrangement de sommeil ont la fâcheuse habitude de mettre tous les types de co-dodo ensemble sans faire la différence entre le partage de lit, le partage du sofa ou le partage du fauteuil. Pourtant, il est bien connu que le partage de sofa ou de fauteuil est nettement plus dangereux que le partage de lit puisque, dans les deux premiers cas, le bébé peut facilement se retrouver coincé.

De plus, ces études ne tiennent pas comptes des autres facteurs de risques connus pour la mort subite du nourrisson. Parmi ces facteurs, on retrouve un environnement de sommeil non-sécuritaire (trop de couvertures, d'oreillers, etc.), le fait de dormir avec un enfant plus vieux ou un animal domestique, le tabagisme des parents, la consommation d'alcool ou de drogues par les parents et l'enfant dormant sur le ventre.

D'ailleurs, une étude réalisée en Alaska et publiée en 2009 démontrait que 99 % des décès lors du partage de lit impliquait une mère fumeuse ou sous l'influence d'alcool ou de drogues. En tenant compte des facteurs de risques et en départageant les différents types de co-dodo, les risques de mort subite du nouveau-né seraient en fait moindres pour le partage de lit.

Cela s'explique en partie par le fait que le partage de lit favorise l'allaitement qui à son tour aide à maintenir la température du bébé plus stable, de même que son rythme cardiaque. Les bébés allaités ont aussi une meilleure oxygénation et moins de pauses de la respiration. L'allaitement est même considéré comme un facteur de protection contre la mort subite du nourrisson.

Pour cette raison, Mme Fetherston croit qu'au lieu de proscrire le partage de lit, la santé publique devrait plutôt mettre le focus sur la réduction des vrais risques associés à la mort subite du nourrisson comme le tabagisme et la consommation d'alcool et de drogues lors du partage de lit. De cette façon, on pourrait s'assurer que les familles qui choisissent ce type d'arrangement de sommeil le font de façon sécuritaire.

Pour en savoir plus sur le partage de lit:
Les risques du partage du lit ou pourquoi il faut lire attentivement les nouvelles études
Le partage du lit pourrait protéger contre l'obésité
Espagne: Le Ministère de la santé et de la politique sociale recommande le cododo dès la naissance
Partage du sommeil sur un lit ou un sofa: Deux situations distinctes
Nouvelle capsule vidéo: Sécurité et partage du lit


Références:
Murdoch University. (2013) New recommendations in bedsharing debate. Consulté le 1er mai 2013 à l'adresse http://media.murdoch.edu.au/new-recommendations-in-bedsharing-debate

Fetherston CM, Leach JS. (2012) Analysis of the ethical issues in the breastfeeding and bedsharing debate. Breastfeed Rev. 20(3):7-17.

Blabey MH, Gessner BD. (2009) Infant bed-sharing practices and associated risk factors among births and infant deaths in Alaska. Public Health Rep. 124(4):527-34.