2 juillet 2013

Question de la semaine: Pourquoi les enfants pleurent-ils lorsqu'ils sont fatigués?

Cette semaine, je réponds à la question de Claire Colin: "Pourquoi pleure-t-on quand on est fatigué ? Particulièrement vrai chez les enfants d'ailleurs..."

Après un après-midi sans sieste, votre petit dernier s'effondre en pleurs en apprenant que son verre bleu est sale et qu'il devra boire dans un verre rouge. Même la promesse de lait au chocolat ne parvient pas à le consoler. Il s'agit d'une situation que tous les parents ont vécu un jour ou l'autre. La perte de sommeil est en effet reconnue pour amplifier les sentiments négatifs lors d'un évènement dérangeant et pour diminuer l'attrait des récompenses ou des activités stimulantes.

En fait, autant chez l'adulte que chez l'enfant, la privation continuelle de sommeil est associée à l'instabilité émotionnelle et aux troubles de la personnalité. La plupart des experts s'entendent d'ailleurs pour dire que presque tous les troubles de l'humeur ont un lien avec les problèmes de sommeil. La cause de cette observation a un nom: le système limbique.

Le système limbique est une portion du cerveau qui est responsable des nombreuses émotions que nous connaissons et de leur régulation. Il est composé, entre autres, du corps amygdaloïde. Les chercheurs ont remarqué que le mauvais fonctionnement du corps amygdaloïde était associé à l'anxiété et à la dépression.

Mais quel est le lien entre celui-ci et le sommeil? Des chercheurs ont remarqué que lors d'une bonne nuit de sommeil, l'activité du corps amygdaloïde diminue. Au contraire, lorsqu'une personne manque de sommeil, cette activité demeure élevée. Le corps amygdaloïde devient alors beaucoup plus réactif aux évènements négatifs. En d'autres termes, lorsque nous sommes fatigués, notre cerveau émotionnel réagit plus rapidement et plus fortement qu'il ne le devrait.

De plus, le repos permet d'établir une bonne connexion entre le corps amygdaloïde et le cortex préfrontal. Le cortex préfrontal est la zone du cerveau responsable du jugement et de la logique. Il étend ses projections jusqu'au corps amygdaloïde. Il peut donc contrôler l'activité de celui-ci. Cependant, lors d'un manque de sommeil, ces connections ne sont plus aussi efficaces.

En résumé, lorsque nous sommes fatigués, le corps amygdaloïde devient hyperactif avec les résultats qu'on connaît. Bien que ces conclusions aient été tirées à partir d'expériences conduites chez les adultes, le même mécanisme peut s'appliquer aux enfants. De plus, sachant que les enfants ont un plus grand besoin de sommeil et que leur cerveau est encore immature, on peut supposer que l'effet est plus marquant.

Des études ont d'ailleurs démontré que le manque de sommeil chez l'enfant était associé à des difficultés au niveau du cortex préfrontal (fonctionnement exécutif), des noyaux basaux (anticipation des récompenses) et du corps amygdaloïde (réactivité émotionnelle).

En conclusion, le manque de sommeil chez un enfant peut être responsable de certaines crises de pleurs en raison de l'hyperactivité du corps amygdaloïde. Cependant, rien qu'une bonne nuit de sommeil ne peut arranger.

Tous les lundis, je réponds à une question des lecteurs sur la périnatalité. Il y a quelque chose que vous auriez toujours aimé savoir concernant la grossesse, l'accouchement, l'allaitement ou le développement de l'enfant? Écrivez-moi à info@mamaneprouvette.com et je tenterai de trouver la réponse.

Références:
Marieb, Elaine N. (2008) Biologie humaine, 2éd., Montréal: Éditions du Renouveau Pédagogique.

van der Helm E, Yao J, Dutt S, Rao V, Saletin JM, Walker MP. (2011) REM sleep depotentiates amygdala activity to previous emotional experiences. Curr Biol. 6;21(23):2029-32. doi: 10.1016/j.cub.2011.10.052. Epub 2011 Nov 23.

Walker MP. (2009) The role of sleep in cognition and emotion. Ann N Y Acad Sci. 1156:168-97. doi: 10.1111/j.1749-6632.2009.04416.x.

Maski KP, Kothare SV. (2013) Sleep Deprivation and Neurobehavioral Functioning in Children. Int J Psychophysiol. 2013 Jun 21. pii: S0167-8760(13)00190-6. doi: 10.1016/j.ijpsycho.2013.06.019.