18 mai 2012

Impact de la pasteurisation sur le lait maternel

C'est maintenant un consensus dans le milieu scientifique: le lait maternel fait des miracles pour la santé des bébés prématurés, notamment pour prévenir l'entérocolite nécrosante. Toutefois, il n'est pas toujours facile d'initier la production de lait lorsqu'une mère accouche prématurément. C'est pour cette raison qu'on met sur pied un peu partout des banques de lait maternel.

Source: Page Facebook de la Calgary Mothers' Milk Bank
Le lait maternel, comme le sang, est un liquide biologique. Il peut donc être un vecteur de transmission pour des virus tel que le VIH ou  l'hépatite C. Pour cette raison, on pasteurise souvent le lait humain, c'est à dire qu'on le chauffe à une température donnée pour une durée bien précise (généralement  62,5°C pour 30 minutes). De cette façon, on élimine les microbes pathogènes, ce qui réduit les risques de contamination pour les bébés recevant le lait en question.

Par contre, quels est l'effet de la pasteurisation sur les propriétés antimicrobiennes du lait maternel? C'est la question que se sont posée des chercheurs belges de l'Hôpital régional Sint-Maria de Halle.

Pour connaître l'impact de la pasteurisation, les chercheurs ont collecté des échantillons de lait maternel chez dix femmes en santé. Chacun des échantillons a été divisé en deux portions: l'une n'a subit aucun traitement et l'autre a été pasteurisée. On a ensuite ensemencé les échantillons, pasteurisés ou non, avec les bactéries E. coli et S. aureus.

Après une incubation de huit heures, les chercheurs ont évalué la croissance des deux microorganismes. Bien que les deux types de lait (pasteurisé ou non) limitaient la croissance des bactéries, le lait pasteurisé était nettement moins efficace. Par conséquent, la pasteurisation a un effet négatif sur les propriétés antimicrobiennes du lait maternel.

Cette étude nous rappelle à quel point les choix en matière de santé reposent toujours sur un équilibre délicat des risques. La pasteurisation du lait permet en effet de diminuer les risques d'infections avec certains virus mais elle diminue aussi l'activité antimicrobienne du lait maternel. Est-ce que cela pourrait diminuer la protection que les prématurés reçoivent via le lait maternel? L'étude actuelle ne va pas jusque là mais amène des interrogations sur la pertinence de la pasteurisation.

Le sang humain utilisé lors de transfusion n'est pas pasteurisé. En effet, les globules rouges ne supporteraient pas ce traitement. Pour éviter les contaminations, on s'assure donc de faire des tests de dépistage rigoureux. Serait-il plus intéressant de fonctionner de la même façon pour le lait humain? C'est une question qui mérite réflexion.

Référence: Marjan Van Gysel, Veerle Cossey, Steffen Fieuws and Annette Schuermans. Impact of pasteurization on the antibacterial properties of human milk. European Journal of Pediatrics. DOI: 10.1007/s00431-012-1750-4