6 juin 2014

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le 5-10-15: des parents répondent

N'importe quel parent aux prises avec un enfant qui ne dort pas a déjà entendu parler du 5-10-15. Méthode miracle pour les uns ou torture sans nom pour les autres, le milieu scientifique possède en fait bien peu d'informations sur la façon dont les parents la perçoivent. Des chercheurs canadiens ont voulu combler cette lacune grâce à un sondage Internet réalisé auprès de 411 parents.

Les scientifiques ont ainsi pu confirmer que plusieurs parents ont recours à la technique de l'extinction graduelle, le nom scientifique du 5-10-15. Ils sont en effet 49,6 % à l'avoir employée et la majorité d'entre eux ont commencé avant que leur bébé ait atteint l'âge de 6 mois. La durée d'utilisation de la méthode varie énormément. Environ 60 % des parents l'utilisent pour moins d'une semaine et 12,7 % pour plus d'un mois. En moyenne, les parents canadiens ont tenté le 5-10-15 à quatre reprises avec leur enfant.

Ce qui est toutefois particulièrement intéressant dans cette étude, c'est l'efficacité rapportée par les parents. En général, ceux-ci estiment que le 5-10-15 est légèrement ou un peu efficace. En chiffre, on parle de 14 % des parents qui déclarent que la technique a éliminé les réveils nocturnes et 41,7 % qui disent au contraire que le 5-10-15 n'en a pas réduit la fréquence. Les parents qui mentionnent l'avoir employé plus souvent sont ceux qui la trouvent la moins utile.

Ces observations entrent en contradiction avec les études cliniques faites sur les méthodes d'extinction graduelle. En effet, elles rapportent toutes des résultats positifs. Selon les auteurs du sondage, les parents qui utilisent le 5-10-15 lors d'un essai clinique reçoivent beaucoup de soutien de la part des professionnels. Ce n'est définitivement pas le cas des parents qui choisissent d'entreprendre cette technique après avoir lu le livre d'un expert autoproclamé.

Le second aspect digne d'intérêt dans cette étude est l'impact du 5-10-15 sur les parents et les enfants. En général, les parents sondés pensent qu'elle est stressante autant pour eux que pour leur petit. En fait, plus un parent croit que la méthode est stressante, moins il la trouvera efficace. Le manque de soutien augmente aussi le stress ressenti et diminuera donc l'efficacité perçue par les parents.

Des études réalisées précédemment avaient d'ailleurs remarqué que parmi les facteurs influençant le succès du 5-10-15, on retrouve la peur de causer du tort à l'enfant et l'incompatibilité de la technique avec la philosophie parentale. On peut imaginer en effet que les parents qui se font répéter depuis la naissance de répondre rapidement aux besoins de leur bébé se sentent désorientés lorsqu'on leur dit qu'il faut maintenant le laisser pleurer.

Selon les auteurs de l'étude, ces résultats devraient modifier la façon dont les professionnels de la santé gèrent les inquiétudes des parents concernant le sommeil. En effet, si un parent a déjà essayé le 5-10-15 sans succès, il sera sûrement sceptique face au médecin qui lui suggère de tenter à nouveau sa chance. De plus, les méthodes d'entraînement au sommeil ne semblent pas efficaces sans le soutien d'un professionnel qui sert de guide. Enfin, il faut être conscient que certains parents ne sont pas à l'aise avec ces techniques. Les professionnels devraient alors considérer d'autres approches plus adaptées aux différents types de famille.

Cette étude constitue une réflexion intéressante sur la façon dont les familles vivent le 5-10-15. Une certaine réserve devant ces résultats est cependant de rigueur. Le sondage ayant été réalisé sur Internet, les parents interrogés sont majoritairement éduqués et avec un revenu familial annuel supérieur à 60 000$. Leurs opinions ne représentent donc pas nécessairement celles de toutes les familles canadiennes.

Référence:
Lynn Loutzenhiser, John Hoffman & Jacqueline Beatch (2014): Parental perceptions of the effectiveness of graduated extinction in reducing infant night-wakings. Journal of Reproductive and Infant Psychology, DOI: 10.1080/02646838.2014.910864