20 août 2012

Question de la semaine: Devrait-on laisser pleurer un bébé?

Aujourd'hui, je réponds à la question d'Isabelle: "Devrait-on laisser pleurer son bébé pour éviter de le gâter?"

Tous les bébés mammifères sont programmés pour pleurer afin de communiquer leur angoisse de séparation et appeler à l'aide. Les chercheurs croient en effet que ce mécanisme a évolué très tôt dans l'Histoire pour s'assurer que le besoin de proximité des nouveau-nés était comblé rapidement. En effet, à une certaine époque, la proximité de la mère était tout simplement nécessaire à la survie d'un bébé.

Bien sûr, les temps ont beaucoup changé et un nourrisson seul dans sa chambre court maintenant peu de risques d'être attaqué par un prédateur. Toutefois, le cerveau des nouveau-nés, lui, a peu évolué depuis et l'absence de la mère demeure donc un signal d'alarme.

Par ailleurs, on sait aussi que les très jeunes bébés sont constamment envahis par diverses émotions car leur cerveau cognitif n'est pas encore assez développé pour réfléchir et analyser une situation. Ils ont donc beaucoup de difficulté à se calmer par eux-mêmes. 

En fait, certains chercheurs croient que si on ne vient pas en aide à un bébé qui tente de se calmer et si on ne répond pas à son besoin de proximité, cela empêche la sécrétion d'hormones ayant un effet calmant sur son système nerveux. L'enfant vit donc une hyperactivité des mécanismes de réponses au stress dans son cerveau. Celui-ci y étant particulièrement vulnérable, cette hyperactivité nuirait ensuite au développement des connexions nécessaires pour pouvoir gérer le stress plus tard.

De plus, lorsqu'on laisse pleurer un bébé pendant une longue période de temps et de façon excessive, certaines substances anxiogènes s'accumulent dans le cerveau et cette accumulation peut être nuisible. Certaines études suggèrent même que dans ces situations extrêmes, les voies de la douleur dans le cerveau sont activées, de la même façon que si l'enfant était blessé physiquement.

Enfin, notons que la réponse aux pleurs peut aussi avoir un impact sur le développement du lien d'attachement. En effet, il semble y avoir une association entre la qualité de l'attachement et la promptitude de la mère à répondre de façon adéquate à la détresse de son enfant. Cela a d'autant plus d'impact qu'un attachement sécurisant permettra à l'enfant de développer une meilleure sociabilité, une meilleure estime de soi, une plus grande indépendance, plus d'empathie et une plus grande persévérance.

En résumé, répondre aux pleurs d'un bébé n'est pas risqué pour le développement d'un enfant. Au contraire, lorsqu'on répond systématiquement à ses pleurs, l'enfant développe un système efficace de gestion du stress et bâtit un lien d'attachement solide avec sa mère. Ce lien l'aidera ensuite à devenir un adulte sociable, confiant, autonome, persévérant et capable d'empathie. On est donc bien loin de la description de l'enfant gâté...

Tous les lundis, je réponds à une question des lecteurs sur la périnatalité. Il y a quelque chose que vous auriez toujours aimé savoir concernant la grossesse, l'accouchement, l'allaitement ou le maternage? Écrivez-moi à info@mamaneprouvette.com et je tenterai de trouver la réponse.

Références:
Cloutier, R., Gosselin, P. et P. Tap. (2005) Psychologie de l'enfant, 2e éd. Montréal: Gaëtan morin éditeur.

Sunderland, Margot. (2011) La science au service des parents. Montréal: Hurtubise.

Newman, J. D.  (2007) Neural Circuits Underlying Crying and Cry Responding in Mammals. Behav Brain Res, 182(2): 155–165.