14 mai 2012

Question de la semaine: La composition du lait maternel change-t-elle pendant l'allaitement?

Aujourd'hui, je réponds à la question de Chantal Caissié: Est-ce que la composition du lait maternel change pendant l'allaitement?

Colostrum et lait mature
Tout comme les besoins d'un bébé changent à mesure qu'il vieillit, la composition du lait change elle aussi. En fait, plusieurs facteurs vont influencer la composition du lait maternel: le stade de la lactation, l'âge gestationnel du bébé, le moment pendant la tétée, la fréquence des tétées et le degré de plénitude des seins.

L'âge gestationnel du bébé
Les mères qui accouchent de bébés prématurés ont un lait beaucoup plus calorique car il contient 30 % plus de gras que le lait des mères de bébés à terme. Le contenu en azote (une composante importante des protéines) du lait "préterme" est aussi 20 % plus élevé que le lait "à terme". Ces particularités démontrent bien les besoins élevés en gras et en protéines des bébés prématurés. Cela explique aussi pourquoi il est préférable, lorsque cela est possible, d'offrir à un bébé prématuré le lait de sa propre mère plutôt que celui de mères donneuses. Bien sûr, si la mère ne peut offrir son propre lait, le lait provenant d'une banque de lait devrait être utilisé avant les préparations commerciales.

Le stade de la lactation
Le lait produit dès la naissance, le colostrum, est plus riche en protéines, en minéraux et moins concentré en gras, en vitamine et en hydrates de carbone. En fait, la composition du colostrum reflète les besoins du bébé dans les premiers jours. En effet, le système immunitaire du nouveau-né est très immature et il a donc besoin d'un coup de pouce pour lutter contre les infections. Avec un lait riche en protéines (et donc en anticorps), même si le nouveau-né ne consomme qu'une très petite quantité de lait, il reçoit la même dose d'anticorps que recevrait un bébé de quelques mois qui consomme un plus grand volume de lait.

De la même façon, au moment du sevrage, la quantité d'anticorps que reçoit l'enfant demeure constante même si le volume de lait diminue graduellement. On sait aussi que le lait des mères qui allaitent depuis plus d'un an est plus riche en gras et en calorie. De cette façon, un pourcentage élevé de l'apport calorique de l'enfant continue de provenir du lait maternel et ce, même s'il tète moins souvent. Par ailleurs, pendant le sevrage, la concentration en protéines et en sodium augmente. C'est d'ailleurs pour cette raison que lait devient alors plus salé. En contrepartie, les taux de potassium, de glucose et de lactose diminuent.

Le moment de la journée
On sait également que les concentrations en azote (et donc en protéines), en lactose et en gras du lait maternel varient pendant une même journée. Par exemple, chez certaines mères, le taux de gras augmente à partir des petites heures du matin jusqu'à la moitié de la journée. Toutefois, ce genre de pattern ne dépend pas seulement de l'heure de la journée mais aussi de la gestion de l'allaitement (à la demande vs selon un horaire). La quantité de lait change également, le volume pouvant augmenter par 3 à 5 fois selon le moment de la journée. Ces observations expliquent en partie le fait que les tétées ne sont pas réparties également pendant une journée.

Pendant la tétée
Au cours d'une tétée, le changement le plus important est la concentration en gras. Généralement, plus la tétée avance, plus le taux de gras augmente. Cela est dû au fait que les gouttelettes de gras du lait ont tendance à coller aux parois des canaux lactifères. Par conséquent, au début de la tétée, lorsque le sein est plein, c'est plutôt le lait riche en eau que le bébé reçoit. Par contre, vers la fin de la tétée, lorsque le volume de lait a diminué, le bébé peut aller chercher les globules de gras plus facilement. Pour cette même raison, lorsque les tétées sont espacées et que les seins sont très pleins, le lait qu'ils contiennent est beaucoup moins gras que lorsque les tétées sont rapprochées.

En résumé, le lait maternel est un liquide dynamique qui se modifie constamment pour répondre aux besoins de l'enfant. Ce phénomène est une preuve de plus que l'évolution a perfectionné la lactation au point d'en faire une mécanique parfaitement réglée.

Tous les lundis, je réponds à une question des lecteurs sur la périnatalité. Il y a quelque chose que vous auriez toujours aimé savoir concernant la grossesse, l'accouchement, l'allaitement ou le maternage? Écrivez-moi à info@mamaneprouvette.com et je tenterai de trouver la réponse. 

Références:
Lawrence, R. A., & Lawrence, R.M. (2005). Breastfeeding: A Guide for the Medical Profession (6th ed.). Philadelphie : Elsevier Mosby.
Riordan, J., & Wambach, K. (2010). Breastfeeding and Human Lactation (4th ed.). Sudbury: Jones and Bartlett.